Sortir Manger / Eating Out

Les pique-niques des ouvrières du textile au Maroc dans les espaces publics / Female Textile Workers’ Picnics in Moroccan Public Open Spaces

in Anthropology of the Middle East
Author:
Gaëlle Gillot Sorbonne Development Study Institute (IEDES), University of Paris 1 Panthéon-Sorbonne, France gaelle.gillot@univ-paris1.fr

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Abstract

Textile workers in Morocco are a vulnerable group. Subjected to exhausting working conditions, poorly paid, often poorly nourished, their lives are structured around working and cooking. Although they say have no leisure activities, they often eat outside. Picnics provide good opportunities for relaxation and above all allow them to make themselves visible throughout the city. This practice gives the textile workers of Rabat and Tangier an experience of urbanness that allows them to appropriate the whole city, to take their time, and to exist as city dwellers. This article is based on a survey carried out as part of an IRD program from 2012 to 2018.

Résumé

Les ouvrières du textile au Maroc constituent une population vulnérable. Soumises à des conditions de travail épuisantes, mal payées, souvent mal nourries, leurs journées sont rythmées par le travail et les repas. Si elles ne se reconnaissent aucun loisir, elles sortent pourtant souvent manger à l'extérieur. Les pique-niques sont des moments privilégiés de détente et surtout ils permettent de se déployer dans la ville et de se rendre visibles. Grâce à cette pratique, les ouvrières du textile de Rabat et Tanger expérimentent une urbanité qui leur permet de s'approprier toute la ville, de prendre leur temps et d'exister en tant que citadines. Cet article repose sur une enquête menée dans le cadre d'un programme IRD de 2012 à 2018.

Au Maroc une étude récente a montré que tous milieux sociaux, tous âges et tous milieux de vie (rural, urbain) confondus, 71,5 pour cent des hommes et 48,7 pour cent des femmes considèrent que « Le rôle le plus important d'une femme est de s'occuper de la maison et de cuisiner pour la famille » (IMAGES 2019). D'ailleurs, seul.e.s 34 pour cent des hommes comme des femmes ont le souvenir d'avoir vu leur père préparer les repas durant leur enfance et encore, cela arrivait souvent lors des moments exceptionnels comme lorsque la mère était malade ou lors de la naissance d'un autre enfant qui rendait la mère indisponible. Ainsi, les repas sont avant tout une affaire de femmes. Il n'est pas étonnant par conséquent que cela soit une préoccupation majeure pour elles en termes d'emploi du temps. Les ouvrières du textile dont nous allons parler ici ajoutent à cette question d'organisation des préoccupations liées à leurs revenus pour acheter des aliments et à l'accès à des équipements pour cuisiner. La responsabilité qui pèse sur elles révèle une organisation sexuée de la société marocaine qui soutient que la place des femmes est auprès de leur famille, dans leur maison, comme un élément constitutif de leur identité de femmes (Lacoste-Dujardin 1996).

Au cours d'une enquête menée de 2012 à 2015 (avec des compléments et mises à jour en 2016 et 2018)1, nous avons étudié les modes de vie, de travail et d'accès à la ville d'ouvrières du textile à Rabat et à Tanger2. L'article repose notamment sur cette enquête qui a comporté 90 questionnaires qualitatifs réalisés auprès d'ouvrières du textile à Rabat et à Tanger, de même que des entretiens individuels approfondis auprès d'une vingtaine de femmes à Rabat et d'une vingtaine à Tanger menés par une équipe de chercheur.e.s marocain.e.s et françaises en arabe dialectal. Des cartes mentales sont venues compléter cette approche à Tanger et des parcours commentés de trajets dans la ville ont été effectués avec une dizaine d'ouvrières à Rabat. Des entretiens complémentaires avec des ouvrières avec lesquelles nous avons gardé le contact ont été menés dans les années qui ont suivi afin de relever l'évolution de leur situation.

Dans les usines enquêtées, 90 pour cent des ouvriers sont des ouvrières. Elles travaillent dur sur des chaînes de production sous-traitantes pour des marques européennes de prêt-à-porter ou de sport et gagnent peu. La crise économique de 2008 a fait baisser leur salaire de 3000 MAD avant la crise à 1200 MAD3 par mois pour 2018. Près de 70 pour cent d'entre elles dans nos enquêtes ont déclaré être soutien de famille (parent, frères et sœurs plus petits ou plus grands) et apporter dans leur propre foyer le seul revenu sur lequel il peut compter. Il n'est pas étonnant dans ce contexte que l'alimentation soit une de leurs préoccupations majeures. La réalité du vécu des femmes à ce propos est liée non seulement à la charge mentale qu'elles supportent quasi-exclusivement mais également à leurs conditions d'accès aux espaces publics urbains, au faible niveau de développement des services publics urbains de la vie quotidienne (l'accès à l'eau ou à l'énergie par exemple peuvent être problématiques) et à leurs conditions, souvent précaires, de logement et de vie qui semble uniquement faite de labeur.

Il s'agira ici de comprendre les contraintes multiples qui pèsent sur les ouvrières du textile, en particulier celles liée à l'alimentation qui, malgré une situation qui s'améliore sur le plan national, n'est pas garantie pour tous les types de populations. Puis nous verrons que loin d'être seulement des victimes, elles mettent en place des stratégies de résistance pour souffler un peu et se déployer dans la ville tout en restant dans les limites de ce qui est acceptable socialement et accessible financièrement pour des femmes de milieux populaires. Le pique-nique fait partie de ces stratégies de résistance non frontale. Il suffit de parcourir les villes lors des beaux jours de repos pour constater que le pique-nique est une pratique très largement répandue. Assises sur des tissus au milieu de terrains vagues, sur des terre-pleins herbeux, sur des ronds-points, dans des parcs et des forêts urbains ou périphériques, partout des familles mangent en plein air. Le pique-nique, qui signifie aujourd'hui manger dehors de façon générique, est un moyen de transgresser gentiment les règles sociales couramment admises, de s'approprier un espace et d'alléger les contraintes. Sous son apparente futilité, la pratique du pique-nique exprime une urbanité des femmes des milieux populaires peu explorée.

Un enjeu majeur pour les ouvrières : se nourrir et nourrir leur famille

Le Maroc est un pays très inégalitaire en général (67e rang pour l'indice de Gini sur 161 pays en 2018) et entre les femmes et les hommes (121e rang sur 189 pays). Même si elle est considérée comme globalement faible, la prévalence de la sous-alimentation reste une question très présente dans le pays où, en 2018, « 14 millions de Marocains [étaient considérés comme] sous-alimentés 4». Cette sous-alimentation touche une femme sur dix, en particulier dans les populations les plus vulnérables où le déficit énergétique est chronique, note la Food and Agriculture Organization of the United Nations (FAO). Elle recense une prévalence de l'anémie chez les femmes en âge de procréer en hausse constante depuis 2010, qui atteint pour 2016 un tout petit peu moins de 37 pour cent5. Le même rapport note que, dans le même temps, la disponibilité en protéines et la suffisance des apports énergétiques alimentaires moyens augmentent de façon générale et assez rapidement dans le pays. La question n'est donc pas tant la disponibilité alimentaire sur le marché que son accessibilité en termes de revenus. On sait par ailleurs que le taux de pauvreté monétaire est de 1,9 pour cent pour les femmes et de 1,6 pour cent pour les hommes. Au Maroc en 2018, environ 20 pour cent des foyers sont dirigés par une femme, dont 67,5 pour cent sont veuves ou divorcées et doivent donc assurer les revenus de leur foyer. Or près de 81 pour cent d'entre elles n'ont aucun diplôme, et seules 23 pour cent sont comptabilisées comme actives occupées6. Les ouvrières du textile que nous avons rencontrées entrent pour beaucoup dans cette dernière statistique et expliquent leur inquiétude quant à l'accès à la nourriture avec leur maigre salaire.

Pour terminer ce tour d'horizon statistique contextuel, on note que selon l'enquête nationale sur l'emploi du temps menée par le Haut-Commissariat au Plan en 20127, le temps consacré quotidiennement aux travaux domestiques et soins donnés aux autres membres du ménage s'élève à 43 minutes pour les hommes et à cinq heures pour les femmes au total, toutes catégories confondues. Ce qui est intéressant pour comprendre que ces inégalités sont structurelles, c'est de voir que quel que soit le niveau scolaire des hommes, ce temps varie très peu. Ainsi, le temps passé aux travaux domestiques et aux soins aux autres est de 49 minutes pour un homme n'ayant aucun niveau scolaire et de 54 minutes pour un homme d'un niveau scolaire supérieur, soit une différence de seulement cinq minutes par jour. La durée consacrée aux travaux domestiques et aux soins à autrui pour les femmes varie davantage puisque les femmes sans niveau scolaire y consacrent 5h12 en moyenne quand une femme d'un niveau scolaire supérieur y consacre 3h36 dans sa journée. Le jour de la semaine ne change rien : de façon globale, les femmes y passent environ 5h et les hommes moins de trois-quarts d'heure. Cela signifie que les femmes, qu'elles travaillent ou non, portent le poids des travaux domestiques et du soin aux autres, celles ayant fait des études réduisant leur temps, notamment en externalisant ces travaux domestiques par l'emploi d'une femme de ménage, puisque les hommes ne participent pas davantage.

Hafida, ouvrière de 47 ans à Tanger, raconte son emploi du temps quotidien de la manière suivante :

Le matin, je me réveille à 5h. Je fais ma prière, je fais cuire le pain et je prépare le petit déjeuner pour moi et ma famille. Je prépare un thermos de repas pour mon mari et pour moi pour le midi. Je sors à 6h de la maison pour commencer le travail à 7h. A 10h30 nous avons une pause. On reprend le travail à 11h jusqu'à 15h30. Je rentre directement ou alors je fais des courses pour le repas. J'arrive vers 17h à la maison où je fais le ménage, je prépare le dîner et le déjeuner du lendemain. Je fais le pain pour qu'il lève pendant la nuit. Je m'occupe de mes enfants avec les devoirs. On mange vers 19h30 ou 20h puis je range tout, je m'occupe de mes enfants, je fais parfois la lessive et je dors vers minuit.

A la charge de la préparation du repas pour la famille, s'ajoute celle du repas qui sera apporté le lendemain à l'usine pour le contremaître, soit pour s'en faire remarquer positivement, soit par contrainte pour conserver leur place à l'usine. Cette forme de corruption via la nourriture semble très répandue et les ouvrières rivalisent de savoir-faire pour lui apporter des plats, à défaut de fournir des tissus à djellaba ou d'acheter des « cadeaux ». Ainsi, la nourriture est aussi une forme d'écot payé par certaines ouvrières qui manifestent leur subordination dans la hiérarchie de l'usine et contribue par ailleurs à compenser un salaire de contremaître lui aussi trop maigre.

Outre les heures d'embauche et de sortie de l'usine qui sont déterminantes, les journées de Hafida, largement rythmées par les repas et leur préparation, ressemblent à celles de beaucoup d'autres ouvrières que nous avons rencontrées. Une des préoccupations principales des ouvrières en dehors du travail est donc de faire à manger et le temps des repas, pris en famille ou, le midi, entre ouvrières assises sur le trottoir devant l'usine. Concernant leur ration alimentaire, elles estiment globalement qu'elles se nourrissent plutôt bien, en tout cas qu'elles n'ont pas faim en général. Mais lorsque l'on entre dans le détail de ce qu'elles mangent, elles expliquent qu'elles mangent de la viande rouge, pour les plus chanceuses, deux fois par mois et, pour les autres, plus nombreuses, une seule fois par an lors de la fête de l'Aïd ou lorsqu'elles se rendent à un mariage. La plupart d'entre elles se nourrissent essentiellement de légumineuses (pois chiches, pois cassés, fèves, haricots, lentilles…) et de légumes (tous les jours). Bien que les fruits soient une composante importante du régime alimentaire marocain8, nombreuses sont les ouvrières qui affirment n'en consommer que trois à quatre fois par semaine voire, pour certaines d'entre elles, seulement aux cérémonies de mariage. Le pain, la plupart du temps fait à la maison, reste une base importante de leur régime alimentaire quotidien. Il est consommé en grande quantité par les ouvrières. Le petit déjeuner est composé de pain avec de l'huile et du thé vert sucré, le repas de la mi-journée s'accompagne de pain pour servir de fourchette et consommer la sauce, quand le pain n'est pas le principal ingrédient, agrémenté d'olives ou parfois de sardines, d'omelette et/ou de tomates. Certaines d'entre elles achètent un sandwich à base de thon à proximité de l'usine lorsqu'elles n'ont pas pu préparer leur déjeuner à la maison. Mais le coût est plus élevé et cette option est plus souvent une solution de dépannage. Le goûter est très fréquent. On y consomme du pain que l'on humecte d'huile, des petites crêpes et on sert du thé vert sucré. Pour beaucoup d'ouvrières, ce goûter pris vers 18h fait aussi office de dîner. Pas étonnant dans ces conditions qu'elles souffrent d'anémie. Avec un rythme de travail harassant durant 8 à 10 heures par jour à l'usine, des transports souvent éprouvants et les 5 heures de travail domestique, les ouvrières considèrent qu'elles travaillent bien au-delà de leurs capacités physiques, et constatent une rapide dégradation de leur corps (Khalil, 2013). Elles ont peu de possibilités pour se détendre et se reposer. Une des ouvrières, 35 ans, rencontrées à Rabat, terminant le récit de son emploi du temps baissa ainsi la tête et avoua dans un souffle : « En vérité, je n'ai plus de vie ; on dirait que je suis une machine qui n'arrête que pour fermer les yeux quelques heures ».

Bouchra, responsable syndicale dans une usine de Rabat qui a fermé depuis l'enquête, explique que, parmi les ouvrières, certaines s'entraident et s'organisent pour améliorer leur quotidien et leur approvisionnement en aliments plus variés et surtout à moindre coût. Faisant appel à la solidarité, et reconnaissant collectivement leurs problèmes liés à l'alimentation, de petits groupes mettent en place une organisation pour rendre à la fois les courses et les repas plus faciles. Bouchra et quatre autres ouvrières, toutes voisines, se rendent très tôt et à tour de rôle le samedi matin au marché au gros de Rabat afin de faire des achats groupés et faire ainsi des économies d'échelle. Elles profitent de la voiture d'un voisin qui s'y déplace pour travailler et y achètent oignons, pommes de terre, légumes, fruits, œufs et parfois poulet ou plus rarement viande de bœuf ou de mouton en assez grandes quantités qu'elles se partagent ensuite et/ou revendent à leurs proches, avec parfois une toute petite commission. De cette manière, elles réalisent des économies à la fois en termes de budget consacré à l'alimentation, mais aussi en temps puisqu'elles ne font elles-mêmes ces courses qu'une fois par mois. Mais une telle organisation nécessite à la fois confiance et stabilité des ouvrières. Ce système repose sur une mise en commun d'une partie de leur salaire hebdomadaire. Fatima, voisine de Bouchra de 42 ans, estime que c'est un « bon système » qui répond à ses besoins car « Mon mari veut voir la marmite bouillir sur le feu chaque jour ». Et pour cela, il est indispensable de se ravitailler…

Faire la cuisine dans des milieux de grande vulnérabilité économique et de logement précaire peut s'avérer être compliqué, même lorsque l'accès aux aliments est résolu ou partiellement résolu.

La plupart des ouvrières que nous avons rencontrées vivent dans des quartiers spontanés où l'accès à l'eau et à l'électricité n'est pas toujours garanti. A Rabat, la majorité des répondantes vivent à Youssoufia près de la zone industrielle. Il s'agit d'un quartier qui s'est construit sans aucune autorisation sous forme d'un bidonville d'abord, puis certains espaces se sont « durcifiés » et des constructions en parpaings et en briques ont remplacé les maisons de tôle. Ce quartier a bénéficié à partir de la fin des années 1990 de plans de restructuration étatiques, qui les ont en partie équipés des services essentiels (Gillot et al. 2015). Mais un bidonville ancien, Douar Doum résiste juste à côté. Ainsi, même parmi les ouvrières, les différences de modalité de logement sont très importantes. On a relevé que la plupart vivent dans des logements très exigus, souvent une seule pièce pour toute la famille où il faut donc loger la cuisine. Equipées soit de plaques de cuisson électriques soit d'une cuisinière (électrique ou plus souvent à gaz—qu'elles se procurent en bouteille), les ouvrières entassent dans la pièce leurs ustensiles de cuisine sans avoir la possibilité de s'installer véritablement et en sécurité pour cuire un repas. Elles cuisinent plutôt le soir en rentrant de l'usine parce que le matin, elles se lèvent très tôt et risqueraient de réveiller toute la famille. L'accès à l'eau courante n'est pas généralisé dans ces bâtisses, c'est pourquoi certaines d'entre elles fonctionnent avec des seaux pour aller chercher de l'eau à la borne fontaine et font la vaisselle à l'extérieur dans des bassines. Tous ces récipients assez gros doivent être stockés dans un espace très petit et inconfortable.

Parmi les ouvrières rencontrées à Tanger, certaines vivent à Bir Chifa, un quartier du sud de Tanger construit lui aussi illégalement. Il est composé de bâtisses de plusieurs étages en parpaings avec des routes très irrégulières, étroites, et des espaces de bidonvilles disséminés à l'intérieur. Les ouvrières auprès desquelles nous avons enquêté vivent dans ce que nous avons appelé « la maison des ouvrières » : elles sont 17 jeunes femmes à y vivre en location, seules ou en colocation avec une ou deux autres camarades d'usine dans une pièce au mobilier très dépouillé. La « maison » dispose d'une cuisine, une douche et de toilettes pour trois étages. Ces jeunes femmes cuisinent la plupart du temps pour elles-mêmes, individuellement, mais partagent le repas du vendredi, traditionnellement un couscous, qu'elles préparent ensemble le soir. La cuisine comprend un réfrigérateur, un bac, un plan de travail et une gazinière. Il n'y a ni table ni chaise ni aucun ustensile dans la cuisine, chacune gardant les siens propres dans sa chambre. La pièce n'est pas aérée. Lorsqu'elles cuisinent le couscous qui produit beaucoup de vapeur, elles ouvrent la fenêtre qui donne sur la chambre de l'une d'elles qui ouvre également la fenêtre de sa chambre. On le voit bien, cuisiner dans ces conditions n'est pas très simple, mais les repas faits maison restent les moins chers, alors elles s'y astreignent. Beaucoup d'entre elles avouent ne manger un « vrai repas » que le midi.

En fin de semaine, lorsqu'elles ne travaillent pas à l'usine, les ouvrières se reposent, s'occupent de leur lessive, font du ménage, s'occupent de leurs enfants et rendent visite à leurs proches, famille ou amis. Peu d'entre elles disent avoir des loisirs personnels. En effet, le stéréotype de la femme laborieuse (pour sa famille) et donc considérée par là-même vertueuse est très présent chez elles, sans compter qu'elles luttent en permanence contre le jugement social selon lequel en travaillant à l'extérieur, elles abandonnent leur famille (Scott 2002). En effet, selon l'enquête IMAGES, il est « plus important pour une femme de se marier que de faire carrière9 ». Dans ce contexte, les « temps de plaisir et de repos pour lutter contre leur surcharge chronique » (de Suremain 2017 : 73) sont très rares. Pourtant, les ouvrières du textile sortent. Le pique-nique est l'une des manières de relâcher la pression et concilie de multiples formes de résistance aux pressions sociales ou quotidiennes. A la fois sortie plaisir et utile, le pique-nique répond également à une manière d'être dans la ville, de revendiquer son « droit à la ville » dans un équilibre entre être visible et invisible. Il crée des micro-espaces de liberté le temps d'un repas peu conventionnel.

Pique-niquer : un acte d'affirmation familiale et citadine

Les ouvrières du textile ont un budget très serré. Il n'est dès lors pas question de fréquenter les restaurants, sans compter que ces derniers ne permettent pas de passer la journée à l'extérieur : une fois qu'on a déjeuné, il faut partir. Le pique-nique, ou déjeuner en plein air, souvent dans un espace de nature, est extrêmement populaire et très largement pratiqué. Repas pris sur l'herbe, mais qui ne se limite pas au fait de manger, c'est une tradition ancienne qui a survécu à toutes les modes. Rien ne semble pouvoir le détrôner chez les personnes modestes.

On peut considérer que les pique-niques contemporains sont en quelque sorte hérités des fêtes de printemps, très courantes depuis des siècles dans de nombreuses cultures. Célébrant le renouveau de la nature après l'hiver, les fêtes de printemps se déroulaient à la campagne et prenaient la forme de « parties de campagne ». Au Maroc, surtout célébrée à Fès, la nzaha a été observée et décrite par Roger Le Tourneau pour les années 1900. Signifiant « délassement », la nzaha n'avait lieu qu'au printemps. Elle était pratiquée par tous les habitants, mais ne constituait pas une habitude hebdomadaire comme c'est le cas aujourd'hui. Il s'agissait de sortir s'aérer, se « verdir les yeux » (Laâbi 2002) et de déjeuner dehors. La nzaha ne se concevait qu'en famille.

Prolongements modernes de cette tradition, souvent vécus comme une fête, comme des moments privilégiés de partage et de détente, les pique-niques se prévoient à l'avance, demandent un peu d'organisation : ils sont familiaux et entraînent donc le transport d'une grande quantité de matériel et de nourriture. Ils durent en général plusieurs heures (voire toute la journée) au cours desquelles les femmes jouent un rôle central, physiquement et symboliquement. Massivement pratiqué, le pique-nique marque les espaces publics à travers les aménagements urbains qu'il a entraînés. On trouve des tables et des bancs, parfois des barbecues spécialement dédiés aux pique-niques dans les grands parcs urbains, en bordure des fleuves et dans les forêts périurbaines autour des grandes villes, car le pique-nique est avant tout un loisir d'urbains. Manger un sandwich à la hâte dans un parc à la pause déjeuner n'est pas considéré comme un pique-nique (Gillot 2002).

Le pique-nique : affirmer sa présence dans la ville

Pour être légitimes dans les espaces publics urbains, les femmes ont besoin d'une « bonne raison » à la fois pour elles-mêmes et pour la société (Coutras 1996). Sortir manger en famille fait partie de ces bonnes raisons qui justifient totalement leur sortie à l'extérieur de leur domicile, alors même qu'elle n'est pas liée à une activité utile au sens matériel du terme. De façon générale, tant que les femmes sont accompagnées par leur famille, elles sont à leur place. Leur place est même centrale dans les pique-niques, de la préparation à l'organisation sur place. Les familles occupent l'espace à partir d'un marqueur essentiel qui le délimite : le tissu (nappe ou tapis) que l'on pose par terre et sur lequel les aliments (préparés ou bruts) sont déposés ainsi que le petit matériel destiné au repas. L'espace approprié est marqué par d'autres objets qui définissent le territoire familial (Rémy et Voyé 1981) comme le réchaud à gaz pour faire le thé ou les jeux pour les enfants (ballon, cartes) et les chaussures que l'on s'empresse d'ôter dès que la nappe est installée par terre. La mère s'assoit sur la nappe et distribue les victuailles. Il arrive qu'elle n'en bouge plus de toute la journée, discutant et se reposant pendant que les autres membres de la famille vont et viennent autour d'elle (Gillot 2008).

« Bonheur ordinaire » (Barthe-Deloisy 2008), le pique-nique est pour les couches populaires une manière de prendre possession d'une ville qui n'a généralement pas été conçue pour elles et dont elles sont souvent exclues en raison de leur faible pouvoir d'achat. Repoussées aux marges, les ouvrières et leurs familles conquièrent les espaces publics de la ville en imposant leur présence colorée, bruyante, parfois odorante (les brochettes cuites au barbecue) et extensive. La ville devient, le temps d'un pique-nique, un territoire ouvert, accueillant, où elles se déploient joyeusement, laissant loin derrière elles les soucis et les blessures physiques et morales de leur travail.

Cette prise de pouvoir tranquille et pacifique des espaces libres rend les familles populaires visibles dans la ville quand d'ordinaire elles peuvent être invisibilisées derrière de grands murs pour que les passants ne voient pas leurs bidonvilles, ou par leurs occupations économiques qui les enferment huit à dix heures par jour dans des usines, ou présentes dans la rue à des horaires décalés. Ces populations mettent en place une résistance passive (Scott 1985) aux aménagements des villes qui tendent à leur intimer l'injonction de se fondre dans le décor, à la fois comme ouvrières (pauvres) et comme femmes. La pratique du pique-nique donne ainsi lieu à de petites transgressions d'occupation de l'espace. Les familles se rendent dans des espaces où on ne les attend parfois pas comme sur des terre-pleins centraux herbeux des beaux quartiers résidentiels où il y a des fleurs, des arbres et peu de voitures qui circulent le week-end. Elles s'installent sur des ronds-points dans les centres-villes, le long des autoroutes paysagées, sur des remblais dominant la mer à Rabat. Elles choisissent d'aller de l'autre côté du fleuve Bouregreg en face de la promenade aménagée où il est interdit de pique-niquer. On les trouve sur les terrains vagues à côté de la zone archéologique du Chellah, et partout où elles peuvent trouver nature et tranquillité. Soudainement, les familles populaires se déploient de façon visible voire ostensible dans les espaces publics urbains, affirmant par là même qu'elles aussi ont droit à la ville (Lefebvre 1968).

Pratiquer toute la ville en s'installant pour un pique-nique est une remise en cause, réelle mais tranquille, du déterminisme spatial que les divisions sociales entraînent dans les usages de la ville. Répétés encore et encore, les pique-niques qui se tiennent dans des lieux où ils ne sont pas attendus finissent par entraîner la considération des pouvoirs publics qui les gèrent. Souvent, ces derniers en viennent à reconnaître les populations qui les fréquentent par l'entretien de ces espaces au risque, dans le cas contraire, de déclasser certains quartiers. C'est ainsi que l'ordre social/spatial est (un peu) remis en cause. Conscientes ou pas, ces « tactiques des démunis transgressant les hégémonies quotidiennes » (de Certeau 1985) sont des formes de résistance à la ségrégation socio-spatiale, sans pour autant la remettre totalement en cause puisque l'occupation n'est que temporaire, le temps d'un déjeuner sur l'herbe. L'espace urbain est bel et bien, pour ces familles, une ressource de liberté et de déconfinement qui leur rend plus supportables des espaces domestiques trop exigus où elles s'entassent durant la semaine. Massifs, les pique-niques peuvent sans doute être considérés comme des « non-mouvements sociaux » (Bayat 2010) pacifiques et joyeux, qui montrent que les familles ouvrières que l'on a approchées ont une « conscience différentielle » (Sandoval 2011) des usages de la ville. Autrement dit, elles résistent, à défaut de le contester ouvertement, à l'ordre socio-économique produit par la gentrification et des aménagements élitistes qui souvent ne les concernent pas.

Le pique-nique : un espace de micro transgressions et de liberté

Les pique-niques, d'un point de vue plus individuel pour les ouvrières, sont des moments de lâcher-prise avec le quotidien. Comme la plupart des repas, hors le petit-déjeuner qui est un moment plus solitaire (Grataloup 2017), le déjeuner sur l'herbe est un moment collectif d'alimentation qui permet de tisser la vie sociale sur un mode festif. Ce qui le caractérise est ce qui en fait son attrait : il s'émancipe d'un certain nombre de contraintes sociales. En effet, il est spontanément anarchique car il ne se déroule pas de la même manière qu'un repas codé, à table (Barthe-Deloisy 2008). Les participants sont assis par terre, dans l'herbe, picorent les aliments dans un ordre qui peut parfois être totalement différent de l'ordre habituellement respecté à la maison. Excepté en période de fête, où les familles emportent avec elles des plats plus élaborés, le repas est composé d'une nourriture préparée à l'avance qui peut être partagée et divisée facilement en portions individuelles : pain, œufs, olives, fromage, tomates, concombre, briouates10, fruits, graines, biscuits secs etc.… Il peut également être préparé in situ lorsqu'il s'agit de faire des sandwichs. On assemble alors sur place les différents aliments.

Chacun s'organise, libre de manger ce qu'il veut, dans l'ordre qu'il veut. On peut, par exemple, commencer par les fruits alors qu'en général ils sont dégustés à la fin d'un repas, grignoter des légumes crus puis des graines, un œuf, etc., ce qui correspond à un repas totalement « dans le désordre ». Les codes de la commensalité sont souvent transgressés pendant ce repas : les enfants peuvent se lever et jouer entre les mets, ne pas les manger en même temps que les autres participant.e.s au pique-nique. On s'essuie les doigts sur la nappe ; on picore de-ci, de-là ce qui se trouve sur la nappe ; on mange allongé dans l'herbe ; le repas peut durer toute la journée si le cœur leur en dit. Cette manière de manger est très spécifique et casse les codes d'une conduite considérée comme convenable, tout en tissant des liens d'intimité liés au partage de la nourriture. Elle rassemble, répond aux pratiques alimentaires d'un groupe social (la famille, les couches populaires) et transmet des règles de sociabilité entre les groupes familiaux. Ainsi, on observe souvent des pique-niqueurs installés assez proches les uns des autres, mais respectant une certaine distance sociale qualifiée par Goffman « d'inattention polie » (Goffman 1973) qui marque le respect de l'intimité des autres dans leur présentation en public. Il ne faut cependant pas perdre de vue qu'au Maroc, la présentation de soi est l'affaire de tous. Rarement une attitude non conforme aux normes sociales passera inaperçue, sans être jugée ni condamnée par les personnes présentes. Ainsi, les transgressions qui ont lieu sont de petites transgressions, qui n'entraînent pas l'opprobre sociale publique.

Malgré le contrôle social, ce moment-là est vécu par tout le monde comme un temps de repos physique et moral qui vient à point lutter contre la fatigue nerveuse, l'épuisement et l'anémie. Il concentre de nombreuses qualités sanitaires : détendre les corps et les extraire de postures douloureuses et contraignantes, permettre de s'oxygéner et prendre la lumière, remplir son esprit d'images de « la » nature, jugée salubre et bonne à la fois pour le corps et l'âme. Se rendre dans un espace de nature est en effet considéré très largement comme nécessaire à la santé et jouit d'une réputation sociale extrêmement favorable, et cela dans la plus pure tradition hygiéniste du dix-neuvième siècle. Dans le même ordre d'idées, on y associe aussi des idées de moralité car les pique-niques sont censés souder les familles, les apaiser grâce au cadre naturel où l'on ne peut qu'être « vrai » et éprouver des sentiments purs (Gillot 2016). « Tu vois, ici dans ce jardin, je me sens en relation directe avec la nature, je respire. On ne peut pas mentir ici », affirme Houda, une ouvrière de 27 ans du plateau industriel installée dans le jardin des Oudayas à Rabat.

Au-delà du repas lui-même, les pique-niques sont des occasions importantes de se livrer à des jeux de plein air, de se dépenser, de bouger autrement des corps ankylosés par le travail et les tâches répétitives. Des jeux collectifs s'organisent souvent, en particulier des jeux de ballon, où tous les membres de la famille jouent, garçons comme filles. Courir, sauter, crier, chanter sont autant de gestes et de bruits que les femmes n'ont pas l'habitude de faire en public dans d'autres circonstances sous peine d'être considérées comme indécentes. Mais dans ce type d'activités, c'est possible. Le contrôle social revoit ses normes. La légèreté et la gaieté sont de mise lors des pique-niques. Ce sont des occasions de liberté d'action.

La mixité de genre marque également les pique-niques. Si l'on se rend déjeuner dehors en famille, on peut également y aller entre amis. Dans ce cas, les conversations entre jeunes de différents sexes sont admises, voire parfois encouragées. Le relâchement des corps et la détente des âmes peuvent être une invitation à faire connaissance sans susciter la réprobation. D'ailleurs, de nombreux couples pratiquent le pique-nique en amoureux. Partager un repas, c'est déjà partager une intimité. S'installer autour ou sur un même tissu, c'est déjà partager un territoire commun. Les pique-niques en tête-à-tête sont très fréquents pour des couples non-officiels qui peuvent ainsi se rencontrer loin des yeux et des oreilles de leurs proches. Peu coûteux, et ne nécessitant que peu de matériel, ils peuvent en revanche se prolonger aussi longtemps que cela est possible. Ils possèdent donc beaucoup d'avantages. Selon ce que l'on souhaite exprimer à son partenaire, le lieu sera choisi minutieusement, et souvent dans des endroits relativement isolés, dans tous les cas hors de l'espace existentiel/de l'interconnaissance afin de profiter de l'anonymat de la ville pour être autonome.

Meriem, ouvrière de 25 ans rencontrée à Tanger, ne s'était reconnu aucun loisir dans l'entretien que nous avions conduit avec elle. Par contre, en dessinant sa carte mentale de Tanger puis en la commentant, elle a fait apparaître des espaces dans lesquels elle se rendait pour faire des pique-niques. Un rond-point herbeux peu éloigné de la corniche était le point de rencontre pour des déjeuners sur l'herbe avec sa famille lorsque celle-ci venait à Tanger pour la voir certains dimanches, apportant à cette occasion des paniers remplis de victuailles de son douar d'origine11. Par ailleurs, Meriem avait dessiné sur sa carte mentale un jardin sur une falaise dominant la mer où se trouve également un café très connu à Tanger. Les détails de sa carte montraient qu'elle connaissait bien le jardin. De fait, situé dans un lieu prisé des amoureux, elle s'y rendait pour pique-niquer avec son petit ami. Personne dans la maison des ouvrières n'était au courant que Meriem avait un ami. Cette activité à la fois simple, facile à mettre en œuvre et peu onéreuse leur permettait de créer une bulle d'intimité secrète dans un espace public fréquenté. Ainsi le pique-nique des amoureux montre parfaitement que ce qui est recherché prioritairement dans cette activité à ciel ouvert est bien un entre-soi, une intimité déployée à l'air libre autour de l'acte de partager de la nourriture.

Le pique-nique donne ainsi lieu à des sociabilités qui sortent de l'ordinaire, tout en étant devenu une activité ordinaire tant il est pratiqué aujourd'hui. Il est l'occasion pour les couches populaires de prendre possession de la ville sans fracas et d'y trouver et d'y revendiquer sa place.

Conclusion

D'abord une affaire de femmes, l'alimentation ordinaire pour les ouvrières du textile que nous avons rencontrées est une préoccupation majeure en raison de leur faible revenu et de leurs conditions de logement. Souvent mal installées, avec un accès limité tant en temps qu'en espace et en diversité à une cuisine de qualité, elles souffrent souvent d'anémie et de fatigue chronique. Les moments de plaisirs hors des gestes utiles sont extrêmement rares. Le pique-nique fait partie des moments privilégiés par les ouvrières puisqu'il allie de nombreuses qualités. Il n'est pas cher car le repas est constitué de ce qui se trouve à la maison. Mis à part le coût du transport, si elles et leur famille s'aventurent un peu loin du domicile, il n'occasionne pas de dépense. Il permet de casser la routine. Il offre à ces femmes, usées par le travail à l'usine et par la charge écrasante et décourageante du travail domestique qui leur incombe entièrement, des moments de délassement et de repos hors de chez elles. Le plein air et les grands espaces sont parmi les caractéristiques qui leur font aimer les pique-niques.

Pratiques avant tout familiales, mais aussi de couples, les pique-niques des couches populaires manifestent que malgré des politiques urbaines parfois très ségrégatives ou excluantes, les espaces publics sont les conditions d'une ville accueillante et inclusive. Ils constituent aussi des ressources très importantes pour des populations d'ordinaire invisibles, tout particulièrement les femmes. La pratique des pique-niques par les couches populaires montre que l'on peut faire partie d'une « communauté imaginée » (Anderson 1983) en étant à la fois avec les autres et entre soi. Elle est révélatrice d'une forme d'urbanité qui, le temps d'un repas, permet de partager les espaces publics, de les mettre en valeur, et de favoriser les pratiques de liberté.

Notes

1

Programme d'excellence d'enseignement et de recherche au Sud, IRD/AIRD Université Mohamed V-Agdal Rabat, Université d'Ottawa, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, « Travail, femmes et villes au Maroc », 2012–2014 et ses compléments 2016 et 2018.

2

Au Maroc, le textile est un des secteurs industriels qui a bénéficié d'un soutien important de l'Etat afin de développer son influence au niveau mondial (Pacte national pour l'émergence industrielle, 2009–2015). Il est un des plus gros pourvoyeurs d'emplois puisqu'environ 27 pour cent des emplois du pays se trouvent dans le secteur du textile (http://www.amith.ma/portail/PageFR.aspx?id=64).

3

MAD = Dirham marocain. Environ de 300€ à 120€ par mois.

4

http://aujourdhui.ma/societe/fao-14-million-de-marocains-sous-alimentes.

7

Les éléments synthétiques de cette étude sont disponibles dans le rapport du HCP cité dans la note précédente.

9

Dans l'enquête IMAGES 54 pour cent des hommes et 53 pour cent des femmes considèrent qu'il « est plus important pour une femme de se marier que de faire carrière », et seuls 55 pour cent des hommes contre 89 pour cent des femmes considèrent qu'une « femme mariée doit avoir les mêmes droits à travailler en dehors du domicile que son conjoint », et comme on l'a vu plus haut, le fait de travailler ne remet pas en cause la division sexuelle du travail domestique.

10

Triangle de pâte très fine salé fourré aux légumes, à la viande, ou sucré fourré avec des amandes et enrobé de miel. Les briouates sont des spécialités marocaines très courantes.

11

Beaucoup d'ouvrières qui travaillent à Tanger sont d'origine rurale. Elles viennent de villages (douars) situés parfois à plusieurs centaines de kilomètres de la ville.

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Eating Out

Female Textile Workers’ Picnics in Moroccan Public Open Spaces

in Anthropology of the Middle East
Author:
Gaëlle Gillot Sorbonne Development Study Institute (IEDES), University of Paris 1 Panthéon-Sorbonne, France gaelle.gillot@univ-paris1.fr

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A recent survey in Morocco showed that, whatever their social class, age, or living environment (rural, urban), 71.5 per cent of men and 48.7 per cent of women believe “a woman's most important role is to keep house and cook for the family” (IMAGES 2019). Moreover, only 34 per cent of men or women remember seeing their father prepare meals during their childhood and that happened most often in exceptional circumstances such as when the mother was ill or when the birth of another child meant that the mother was not available. Thus meals are, above all, women's business. Consequently, it is not surprising that cooking is a major factor in how they organise their time. In addition to the question of organisation, the female textile workers described in this article also have concerns about finding the money to purchase food and about access to cooking facilities. The responsibility weighing on them reveals that the organisation of Moroccan society is gender-specific, maintaining that being with her family, in the family home, is a constitutive element of a woman's identity (Lacoste-Dujardin 1996).

During a survey conducted between 2012 and 2015 (with complements and updates in 2016 and 2018),1 we studied female textile workers in Rabat and Tangier in relation to their lifestyle, work, and access to the city.2 This article is based on the survey, which included 90 qualitative questionnaires filled in by female textile workers in Rabat and Tangier, as well as individual in-depth interviews with 21 women in Rabat and 17 in Tangier carried out by a team of Moroccan and French researchers in dialectal Arabic. In Tangier, mental maps were used to complement this approach while in Rabat nine female workers gave us a commentary as they moved through the city. Complementary interviews were conducted in the following years with those workers with whom we had remained in contact in order to identify changes in their situation.

In the factories that were surveyed, 90 per cent of the workers are female. They work hard on production lines for sub-contractors to European ready-to-wear and sportswear brands and earn little. The 2008 economic crisis reduced their pre-crisis salary of 3,000 MAD to 1,200 MAD3 per month in 2018. Nearly 70 per cent of those surveyed declared that they had family to support (parents, older or younger siblings) as well as providing their own household with its only reliable income. In this context it is not surprising that food is one of their major concerns. The reality of life for these women involves not only the mental burden they bear almost exclusively but also their conditions of access to public open space in urban areas, poorly developed basic urban public services (for example, access to water and energy can be problematic), their often insecure living conditions, and their lives as a whole that seem to consist of nothing but work.

Our objective here is to understand the many constraints that weigh on female textile workers, particularly the quality of their diet, which, despite improvements at national level, is not guaranteed for all categories of people. We will then see that, far from being only victims, they have developed resistance strategies to lighten their burden a little and to make use of urban space while remaining within the limits of what is socially acceptable and financially possible for working-class women. Picnics are one of these oblique resistance strategies. It is enough to wander through the cities on fine weekends to see that picnicking is very widespread. Sitting on pieces of cloth on wasteland, on grassy embankments, in the middle of roundabouts, in urban or peripheral parks and forests, families are eating outdoors everywhere. The picnic, which today is a generic term for eating outdoors, provides a means of gently transgressing currently accepted social rules, appropriating urban open space, and easing constraints. Behind its apparent triviality, picnicking expresses an urbanness among working-class women that has been little explored.

A Major Issue for Female Workers: Feeding Themselves and Their Families

Generally speaking, Morocco is a very unequal country (67th out of 161 countries on the Gini Index in 2018) including inequality between men and women (121st out of 189 countries). Even if it is considered to be low in overall terms, malnutrition remains a very real issue in a country where, in 2018, ‘14 million Moroccans [were considered to be] undernourished’.4 This undernourishment affects one woman in ten, particularly in the most vulnerable categories where the energy deficit is chronic according to the United Nations Food and Agriculture Organization (FAO). The FAO has recorded a constant increase in anaemia in women of childbearing age since 2010, reaching just under 37 per cent in 2016.5 The same report notes that, at the same time, the availability of protein and the adequacy of the mean quantity of energy provided by food is generally increasing fairly quickly in the country. The question is therefore not so much the availability of food on the market as financial access to it. In addition, we know that the rate of monetary poverty is 1.9 per cent for women and 1.6 per cent for men. In Morocco in 2018, approximately 20 per cent of households were run by women, of whom 67.5 per cent were widowed or divorced and therefore had to provide all the income for their household. Nearly 81 per cent of these women had no qualifications, and only 23 per cent were recorded as actively employed.6 Many of the female textile workers we met were included in that 23 per cent and explain their difficulties in access to food in terms of their meagre wages.

To conclude this contextual statistical review, we note that according to a national survey of how people spend their time, carried out by the Haut-Commissariat au Plan (the Moroccan government body dealing with statistics) in 2012,7 the time devoted to housework and looking after the other members of the household totals 43 minutes per day for men and 5 hours per day for women, all categories combined. In order to understand that these inequalities are structural, it is interesting to see that whatever the educational level of men, this time varies very little. Thus, the time spent on housework and caring for others is 49 minutes for a man with no schooling and 54 minutes for a man who has studied to a high level, a difference of only 5 minutes per day. For women, the time devoted to housework and caring for others varies to a greater degree since women without schooling spend a mean of 5 hours and 12 minutes per day while women who have studied to a high level spend 3 hours and 36 minutes per day. The day of the week does not change anything. In global terms, women spend about five hours and men less than three quarters of an hour. This means that women, whether they work or not, bear the brunt of housework and caring for others; those who have studied to higher levels reduce this time by externalising domestic tasks – employing a maid – because the men do not contribute more.

Hafida, a 47-year-old worker from Tangier, describes her daily schedule as follows:

I wake at 5 a.m. I pray, bake the bread, and prepare breakfast for myself and my family. I prepare thermos meals for my husband and myself for midday. I leave the house at 6 a.m. to start work at 7 a.m. At 10.30 a.m. we have a break. We restart at 11a.m. and finish for the day at 3.30 p.m. I either go straight home or go shopping for food. I arrive home at about 5 p.m. when I do the housework and prepare dinner and the next day's breakfast. I make dough so that it rises during the night. I help my children with their homework. We eat at 7.30 or 8 p.m. then I tidy everything, look after the children, sometimes do the washing and get to sleep at about midnight.

Added to the burden of preparing meals for the family is preparing the meal that will be taken to the factory the next day for the foreman, either to attract positive attention, or under constraint in order to conserve their job at the factory. This form of food-based corruption appears to be very widespread and the workers rival one another in ingenuity to bring him/her meals, material for a djellaba, or even to buy him/her ‘gifts’. Food is a kind of fee paid by some female workers, demonstrating their subordinate rank in the factory hierarchy and also helping to compensate for the foreman's too low salary.

Apart from her specific start and finish times at the factory, Hafida's days, mostly taken up with preparing and eating meals, resemble those of many other female workers we met. One of the female workers’ main occupations outside work is preparing food and eating it, either with the family or, at midday, sitting with other workers on the pavement outside the factory. As far as their daily intake is concerned, generally speaking they believe they eat fairly well, or at least they are not hungry most of the time. But when we looked in detail at what they eat, they said that the luckiest among them eat red meat twice a month while a greater number eat it only once a year on the day of the Eid el-Kebir or when they go to a wedding. Most of them have a diet based on legumes (chickpeas, split peas, broad beans, haricots, lentils) and vegetables (every day). Although fruit is a major component of the Moroccan diet,8 many female workers said that they only eat it three or four times a week or even, in some cases, only at wedding feasts. Bread, home-made most of the time, forms a significant part of their daily diet. The female workers consume large quantities. Breakfast consists of bread with olive oil and sweetened green tea, the midday meal is accompanied with bread to act as a fork and to mop up the sauce, when bread is not the main ingredient, with the addition of olives or sometimes sardines, omelette, and/or tomatoes. Some of them buy a tuna sandwich near the factory when they have been unable to prepare their lunch at home. But this costs more and is only used as a last-minute option. They often eat a snack: bread moistened with oil, small pancakes, and sweetened green tea. For many of the female workers, this snack, eaten at 6 p.m., takes the place of dinner. It is not surprising under these conditions that they suffer from anaemia. With eight to ten hours of exhausting work at the factory every day, gruelling journeys to and from work and five hours of domestic work, the women feel that they work well beyond their physical capacity and observe rapid deterioration of their bodies (Khalil 2013). They have few opportunities to relax and rest. A 35-year-old woman we met in Rabat ended the description of her daily schedule, lowered her head, and admitted in a whisper: ‘The truth is that I no longer have a life; you could say that I'm just a machine that only stops to close its eyes for a few hours’.

Bouchra, a union representative in a Rabat factory that has closed since the survey was carried out, explained that some of the women help each other and organise themselves to make their day-to-day lives easier and procure a greater variety of food, and most importantly at a lower cost. Appealing for solidarity and collectively recognising their food-related problems, small groups organise themselves to make both shopping and cooking easier. Bouchra and four other female workers, all neighbours, take turns going very early on Saturday mornings to the wholesale market in Rabat in order to buy in bulk, thus achieving economies of scale. They take advantage of the fact that a neighbour drives to work there and they buy onions, potatoes, vegetables, fruit, eggs, sometimes chicken and more rarely beef or mutton in sufficiently large quantities that they can share the food or sell it to their friends, family, and neighbours, sometimes for a very small commission. In this way, they economise not only on their food budget but also their time because each one only goes shopping once a month. But this kind of system requires both trust and stability among the female workers. It relies on pooling part of their weekly wages. Fatima, Bouchra's 42-year-old neighbour, considers this to be a ‘good system’ that meets her needs because ‘my husband wants to see something cooking on the fire every day’. To achieve that, you have to be able to restock with food.

Cooking in conditions of great economic vulnerability and poor housing can be very difficult, even when access to the food itself is completely or partly resolved. The majority of the women we met lived in places that have just sprung up, where access to water and electricity is not always guaranteed. In Rabat, most of those who responded live in Youssoufia, near the industrial area. The district was built without any planning permission, first in the form of a shanty town, then certain areas became ‘consolidated’ with breeze block and brick buildings replacing corrugated iron shacks. From the end of the 1990s, the district benefitted from state-led restructuring plans, partially equipping it with essential services (Gillot et al. 2015). An old shanty town, Douar Doum, remains just next to it. Thus, even the female workers differ widely in the quality of their accommodation. We found that the majority of them have very little space, often a single room for the whole family, which must also house the kitchen. Equipped either with electric hotplates or a cooker (electric or more often gas, which they buy in bottles), the women fill the room with their cooking utensils without being able to organise themselves to cook a meal properly and safely. They tend to cook in the evening when they get home from the factory because they get up very early in the morning and would risk waking the rest of the family. Not all of these buildings have access to running water, which is why some of the women use buckets to fetch water from the fountain and wash the dishes outdoors in bowls. All these fairly large containers must be stored in a very small, uncomfortable place.

Some of the women we met in Tangier live in Bir Chifa, a district south of the city, also built illegally. It consists of breeze block buildings several stories high with very uneven, narrow roads and areas of shacks scattered among them. The female workers we surveyed lived in what we called “the female workers’ house”: 17 young women rent very sparsely furnished rooms there, alone or sharing with one or two colleagues from the factory. The “house” has one kitchen, one shower, and one WC for three stories. Most of the time the young women cook for themselves, individually, but they share their Friday meal, traditionally couscous, which they prepare together in the evening. The kitchen has a refrigerator, a rudimentary sink, a work surface, and a gas cooker. The kitchen has neither table nor chairs nor any utensils, each woman keeping her own things in her room. The kitchen is not ventilated. When they cook the couscous, which produces a lot of steam, they open the window that opens into the room of one of the girls who in turn opens her window. It is clear that cooking in these conditions is not easy, but home-made meals are still the cheapest, so they force themselves to do it. Most of them admit to only eating a “real meal” at midday.

On the weekend, when they do not work at the factory, the women rest, do their washing and other housework, care for their children, and go to see their family and friends. Few of them say that they have any personal leisure activities. Indeed, the stereotype of the woman who works hard (for her family) and is thus considered for that very reason virtuous is very present among them, never mind the fact that they are permanently fighting the social judgement according to which, by working outside the home, they are abandoning their families (Scott 2002). Indeed, according to the IMAGES survey, it is ‘more important for a woman to marry than to have a career’.9 In this context, ‘time for pleasure and rest to combat their chronic overwork’ (de Suremain 2017: 73) is very rare. Nevertheless, the female textile workers do go out. Picnicking is one way of relieving the tension and combining many forms of resistance to social and daily pressures. An outing that is both pleasurable and useful, the picnic is also a way of being in the city, of claiming their ‘right to the city’ in a balancing act between being visible and invisible. It creates microcosms of freedom during an unconventional meal.

Picnicking: Asserting Their Central Family Role and Their Urban Citizenship

The female textile workers live on a very tight budget. There is no question of going to restaurants, apart from the fact that they do not allow you to spend the day outside: once you have eaten, you must leave. Picnics, eating lunch outdoors, often in a natural area, is extremely popular and very widespread. A meal eaten on the grass, but not limited to the act of eating, picnicking is an ancient tradition that has survived every whim of fashion. Nothing seems to be able to replace it among people on low incomes.

In a way, contemporary picnics may be considered a legacy of spring festivals, very common for centuries in many cultures. Celebrating the renewal of nature after the winter, spring festivals took place in rural areas in the form of ‘a day out in the country’. In Morocco, celebrated above all in Fez, the nzaha was observed and described by Roger Le Tourneau in the 1900s. Meaning ‘relaxation’, the nzaha was only held in the spring. Everyone took part, but it was not a weekly habit as is the case today. It was a question of going out to take the air, ‘greening the eyes’ (Laâbi 2002) and lunching outdoors. The nzaha could only be conceived of as a family outing.

Picnics are modern extensions of this tradition, often experienced as parties, special moments of sharing and relaxation, they are planned in advance and require a little organisation: they involve all the family and thus require the transport of a large quantity of equipment and food. Generally they last for several hours (even the whole day) during which the women play a central role, both physically and symbolically. Very widely practiced, picnics have an impact on public open space by virtue of the urban installations they require. Tables and benches and sometimes barbecues specially for picnics are installed in major urban parks, beside rivers and in the forests that surround big cities, because picnicking is above all an urban leisure activity. Wolfing down a sandwich during the lunch break is not considered picnicking (Gillot 2002).

The Picnic: Asserting Your Place in the City

Women need a ‘good reason’, both in their own eyes and in those of society, to be considered legitimate occupiers of public open space (Coutras 1996). Going out to eat with family is one of those good reasons that fully justifies being outside the home, even though it is not related to a ‘useful activity’ in the material sense of the term. Generally speaking, as long as women are accompanied by their families, they are in their proper place. That place is even central to the picnic, from preparation to in situ organisation. Families occupy open space by virtue of an essential item that demarcates it: the piece of material (tablecloth or rug) that they place on the ground and on which the food (prepared or otherwise) is spread, along with the cutlery and other items necessary for the meal. The territory that the family appropriates is defined by other objects (Rémy and Voyé 1981) such as the gas stove to make the tea, games for the children (balls, cards), and the shoes that everyone is in a hurry to remove as soon as the cloth is placed on the ground. The mother sits on the cloth and distributes the food. It may be that she does not move the whole day, talking and resting while the other members of the family come and go around her (Gillot 2008).

A source of ‘ordinary happiness’ (Barthe-Deloisy 2008) for the working classes, the picnic is a means of taking possession of a city that has generally not been designed for them and from which they are often excluded because of their low purchasing power. Marginalised, workers and their families conquer the city's public open space, imposing their colourful, noisy, sometimes smelly (kebabs cooked on the barbecue), and widespread presence. While the picnic lasts, the city becomes an open, welcoming place, where they spread out joyfully, leaving the worries and physical and moral wounds of their work far behind them.

This tranquil, peaceful possession of available open space makes working-class families visible in the city when ordinarily they may be rendered invisible behind high walls so that passers-by do not see their shanty towns, or by their jobs that keep them inside factories for eight to ten hours a day, or by being in the street outside ‘normal’ hours. These working-class families offer passive resistance (Scott 1985) to the way cities are laid out, which tends to force them to blend into the background, both as (poor) workers and as women. Picnicking thus gives rise to small transgressions relating to the occupation of space. The families go to places where they are not necessarily expected, such as the grassy central reservations of chic residential districts where there are flowers, trees, and few cars on the weekend. They sit down on city-centre roundabouts, along landscaped motorways, on embankments overlooking the sea in Rabat. They choose to go to the other side of the river Bouregreg from the landscaped promenade where picnicking is forbidden. They can be found on wasteland next to the Chellah archaeological site, in fact anywhere that they can find nature and tranquillity. Suddenly, working-class families spread out visibly, even conspicuously, in public open space in urban areas, thus affirming that they also have a right to the city (Lefebvre 1968).

Making use of the whole city by settling down for a picnic is a way of calling into question, in a real but tranquil manner, the spatial determinism that social divisions cause in how cities are used. Held over and over again, picnics that occur where they were not expected eventually attract the attention of the city authorities. Often, the authorities end up recognising the categories of people who use the city by managing the open spaces accordingly at the risk, if they fail to so manage them, of downgrading some districts. Thus the social/spatial order is (to a small extent) called into question. Consciously or otherwise, these “tactics of the impoverished transgressing day-to-day hegemonies” (de Certeau 1985) are forms of resistance to socio-spatial segregation without challenging it totally, because the occupation is only temporary, just for the time it takes to eat lunch on the grass. For these families, public open space is a resource offering liberty and freedom from confinement, thus making the cramped domestic quarters into which they are squeezed during the week more bearable. Practiced on a massive scale, picnics can no doubt be considered to be peaceful and joyful “social non-movements” (Bayat 2010), showing that working-class families we encountered have a “differential conscience” (Sandoval 2011) of how the city should be used. In other words, they are resisting, while not openly contesting, the socio-economic order produced by gentrification and elitist urban development that often do not concern them.

The Picnic: Opportunities for Micro-Transgressions and Freedom

From the more individualised viewpoint of the female workers, picnics provide opportunities to escape the daily grind. Like most meals, apart from breakfast, which is a more solitary occasion (Grataloup 2017), lunch on the grass is an occasion to eat together that helps forge social links in a festive setting. Its principal characteristic is what makes it attractive: it frees those involved from a certain number of social constraints. Indeed, it is spontaneously anarchic because it does not take place in the same manner as a meal at a table with all its codes (Barthe-Deloisy 2008). The participants sit on the grass, nibbling food in an order that may sometimes be totally different from that usually followed at home. Except on festive occasions, when families take more elaborate dishes with them, the meal consists of food prepared in advance that can easily be shared and divided into individual portions: bread, eggs, olives, cheese, tomatoes, cucumber, briouates,10 fruit, seeds, dry biscuits, etc. The meal can also be prepared in situ when it involves sandwiches. The different foods are then assembled at the picnic.

Everyone is free to eat what they want in the order they want. For example, you can start with fruit, which in general would be eaten at the end of a meal, chew on some raw vegetables then some seeds, an egg, and so forth, making a meal that is completely ‘out of order’. The codes governing dining etiquette are often broken during such meals: children can get up and play between items, and not eat them at the same time as the other people at the picnic. People wipe their fingers on the cloth; they nibble here and there what they find on the cloth; they eat while lying in the grass; the meal can last all day if people feel like it. It is a very specific way of eating, breaking the codes of behaviour that are considered seemly while creating intimate links based on the sharing of food. It brings people together, responds to the eating practices of a social group (the family, the working classes), and transmits rules of sociability between family groups. Thus, picnicking groups can often be seen fairly close to one another, but maintaining a certain social distance, described by E. Goffman as ‘politely ignoring’ (Goffman 1973), which marks the respect of other people's privacy in relation to how they present themselves in public. It must not, however, be forgotten that in Morocco, how you present yourself is everyone's business. An attitude that does not conform to the social norms will rarely go unnoticed, even if it is neither judged nor condemned by those who are present. Thus, any transgressions that do occur are small and do not call down social opprobrium in public.

Despite the social control, everyone treats such occasions as essential opportunities to rest, physically and morally, thus combatting their nervous fatigue, exhaustion and anaemia. Picnicking has numerous health benefits: the body can relax and forget the painful, constraining postures of the working week; participants benefit from fresh air and light; they can fill their minds with images of ‘nature’, considered to be wholesome and good for both body and soul. Visiting ‘natural’ open space is very widely considered to be necessary for good health, and it enjoys an extremely favourable social reputation in the purest nineteenth-century hygienist tradition. Similarly, visiting open space is also associated with ideas of morality, because it is supposed to bring families together, render them calmer thanks to the natural setting where people can be nothing but ‘true’ and have pure feelings (Gillot 2016). ‘You see, here in this garden, I feel I have a direct relationship with nature; I can breathe. You can't tell lies here’, says Houda, a 27-year-old industrial worker, while sitting in Rabat's Oudayas garden.

Beyond the meal itself, picnics provide good opportunities for outdoor games and exercise when the body, stiff from work and repetitive tasks, can move in a different way. Games are often organised, particularly ball games, which can include all the members of the family, boys and girls. Running, jumping, shouting, singing are all movements and sounds that women are not accustomed to making in public under other circumstances without being considered indecent. But at a picnic, they become possible. Social control revises its norms. Light-heartedness and gaiety are appropriate at picnics, which provide the opportunity to act freely.

Picnics are also noteworthy for the mixing of genders. Although people eat outdoors with their families, they can also do so with friends. In this case, conversations between young people of both sexes are allowed, sometimes even encouraged. Relaxation of body and soul can be an invitation to get to know someone else without incurring reprobation. Moreover, many couples go for romantic picnics. In itself, sharing a meal means sharing intimacy. Sitting around or on the same cloth means sharing common territory. One-to-one picnics are very common for unofficial couples who can thus meet far from the eyes and ears of family and friends. They have many advantages, requiring little money or equipment and, on the other hand, lasting as long as the participants want. Depending on what the organiser wants to express to their partner, the location will be very carefully chosen, often somewhere relatively isolated, in any event away from well-known, regularly used places in order to take advantage of the city's anonymity and be independent.

Meriem, a 25-year-old worker we met in Tangier, said during our interview that she had no leisure activities. On the other hand, when she drew, and commented upon, her mental map of Tangier, she described places where she went for picnics. A grassy roundabout not far from the corniche was the meeting place for picnic lunches with her family when they came to see her in Tangier on certain Sundays, bringing baskets full of food from her home village.11 Meriem's mental map also included a garden on a cliff overlooking the sea where there is very a well-known Tangier café. The details on her map showed that she knows the garden well. In fact, it is a place popular with lovers, and she went there to picnic with her boyfriend. No one in the female workers’ house knew that Meriem had a boyfriend. Picnicking, which is simple, easy to organise, and inexpensive, enabled them to create a secret world of intimacy in a much-frequented public place. Thus a lovers’ picnic is a perfect demonstration of what people seek from this outdoor activity: togetherness and intimacy deployed in the open air around the act of sharing food.

The picnic thus gives rise to modes of social interaction that are out of the ordinary, although the activity as it is practiced today has become ordinary. It provides the opportunity for the working classes to take ownership of the city without commotion and to find and claim their place.

Conclusion

For the female textile workers we met, basic nourishment, which is the woman's responsibility in Morocco, is a major concern because of their low incomes and poor housing conditions. Often poorly housed, with limited opportunity in terms of time, space and variety for good-quality cooking, they often suffer from anaemia and chronic fatigue. Occasions for pleasure outside the everyday routine are extremely rare. Their many qualities make picnics special occasions for the female workers. They are inexpensive because the meal consists of what can be found at home. Apart from the cost of transport, if they and their families go a little further from home, there is no other expenditure. They provide a break in the routine. They offer these women, worn out by factory work and the overwhelming and demoralising burden of domestic chores, which fall entirely on their shoulders, opportunities for rest and relaxation outside the house. They appreciate the fresh air and open space associated with picnics.

Practiced above all by families, but also by couples, working-class picnics show that, in spite of highly segregationist or exclusive urban policies, public open space is a sine qua non of a welcoming, inclusive city. It is also a very important resource for categories of people who are usually invisible, particularly women. Picnicking as practiced by the working classes show that one can be part of an “imagined community” (Anderson 1983) being both with other people but only with one's chosen companions. It reveals a kind of urbanness which, while the picnic lasts, enables people to share and make the most of public open space and taste freedom.

Notes

1

Programme for excellence in teaching and research in the south, IRD/AIRD University Mohamed V-Agdal Rabat, University of Ottawa, University of Paris 1 Panthéon-Sorbonne, ‘Work, Women and Cities in Morocco’, 2012–2014 with updates and complementary studies in 2016 and 2018.

2

In Morocco, the textile industry, among others, has received significant state support in order to develop its global influence (National Pact for Industrial Emergence, 2009–2015). It is one of the country's biggest employers, accounting for 27 per cent of Morocco's jobs (Association Marocaine des Industries du Textile et de l'Habillement, ‘An Export Champion’, http://www.amith.ma/portail/PageFR.aspx?id=64 [accessed 22 October 2020]).

3

MAD = Moroccan Dirham. From approximately 120€ to 300€ per month.

4

Aujourd'hui, ‘FAO: 1.4 million Moroccans undernourished’, http://aujourdhui.ma/societe/fao-14-million-de-marocains-sous-alimentes (accessed 22 October 2020).

5

Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture, ‘Maroc’, http://www.fao.org/faostat/fr/#country/143 (accessed 22 October 2020).

6

Portail du HCP, ‘Femme Marocaine en Chiffres’, https://www.hcp.ma/downloads/Femme-marocaine-en-chiffres_t18705.html (accessed 22 October 2020).

7

A summary of this study is available in the HCP report quoted in the previous note.

8

Nutrition et protection des consommateurs, ‘Profils nutritionnels par pays’, http://www.fao.org/ag/agn/nutrition/mar_fr.stm (accessed 22 October 2020).

9

In the IMAGES survey, 54 per cent of men and 53 per cent of women believe it is ‘more important for a woman to marry than to have a career’, and only 55 per cent of men – compared with 89 per cent of women – believe a ‘married woman should have the same right to work outside the home as her spouse’. As we saw above, the fact of having a job does not change the gender difference in relation to domestic tasks.

10

Triangle of very fine savoury pastry stuffed with vegetables and meat, or sweet pastry stuffed with almonds and coated in honey. Briouates are very widespread Moroccan specialities.

11

Many of the women who work in Tangier are of rural origin. They come from villages (douars) sometimes located hundreds of kilometres from the city.

Contributor Notes

Gaëlle Gillot est maîtresse de conférences en aménagement-géographie du développement à l'Institut d'étude du développement de la Sorbonne (IEDES)/Université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Elle est chercheure au laboratoire Développement et Sociétés (IRD/UP1). Elle a passé trois ans en délégation IRD en affectation à l'Université Hassan II de Casablanca pendant lesquels elle a mené des enquêtes sur les ouvrières du textile au Maroc. Elle a par la suite participé à l'enquête IMAGES (International Men and Gender Equality Survey—MENA, Promundo/SIDA/ONU Femmes) sur les masculinités. Elle poursuit des recherches sur l'accès des femmes aux espaces publics dans le monde arabe. Email: Gaelle.Gillot@univ-paris1.fr

Gaëlle Gillot is a lecturer in planning and development geography at the Sorbonne Development Study Institute (IEDES), University of Paris 1 Panthéon-Sorbonne. She is a researcher at the Development and Societies Laboratory (IRD/UP1). She spent three years as part of an IRD delegation on assignment to the Hassan II University of Casablanca during which she carried out surveys on textile workers in Morocco. She then participated in the IMAGES (International Men and Gender Equality Survey – MENA, Promundo/SIDA/UN Women) survey of masculinities. Her current research focuses on women's access to public open space in the Arab world. Email: gaelle.Gillot@univ-paris1.fr

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